Athéna
De Romain Gavras
par Andre Darmon
Athéna fait parler de lui dans toute la France comme Bac Nord l’avait fait avant les élections présidentielles et je pense avec délice que si ce film noir avait été catapulté au même moment que Bac Nord, Eric Zemmour serait pour le moins Premier ministre aujourd’hui. Aussi, je dirais que ce film qui se passe dans une banlieue dévastée et futuriste est à la banlieue marseillaise de Bac Nord, ce qu’est la guerre est à une cour de récréation. Une énorme bavure a été commise dans la cite Athéna et Idir, un jeune arabe, a été tué, par la police, disent certains, par un groupe d’extrême droite, affirment d’autres. Ses trois frères éplorés, ont des parcours différents, l’un est officier dans l’armée de retour du Mali et il aspire au clame ; l’autre est le roi de la drogue du quartier, tandis que le plus jeune est le guide charismatique des rebelles et des petites frappes armées de Kalachnikoffs et de cocktails Molotov.
Fausse sublimation
C’est cette opposition, digne des grands paradigmes hollywoodiens, qui va livrer ce que certains appellent un navet et d’autres, une pièce maitresse du cinéma, un petit-fils batard de ‘la Haine ». Ne transigeons pas sur la mise en scène du fils de Costa Gavras qui frôle souvent la virtuosité et qui m’a rappelé sans je ne comprenne pourquoi, l’extraordinaire ‘1917’, un film qui n’était construit pendant deux heures que par deux plans séquences hallucinants. Athéna est un film scéniquement puissant même s’il abuse des gros plans et de la caméra à l’épaule. Ce n’est pas un film de banlieue, c’est un film de guerre scandé par une bande son brodée par les thèmes de batailles mais aussi par l’Opera. Pour résumer puisque la place nous manque ce mois-ci, il faut voir le film pour se figurer ce que pourrait devenir la France dans un an, dans deux dans, dans dix ans, peut-être même demain. Il nous faudra aussi se désintoxiquer de cette empreinte onirique du film, de cette fausse sublimation, qui le fait passer pour une tragédie antique et fait croire de manière subliminale que ses protagonistes ne sont que les victimes du système.